Y a-t-il encore quelque terrain qui ait échappé au cadastre ? On ne le pense pas. C’est pourquoi les néo-sauvages veulent atomiser la terre. Il ne reste plus d’objets non encore possédés de rapine.  Ces lieux où le rêve s’épanchait  –encore suintant à partir du cerveau, ces endroits indécis par droit de naissance, ne sont-ils donc plus ? Oui. On étouffe, même sur le papier.


Alors, que faut-il faire ? Quitter le bateau trop chargé à partir duquel les terrains vagues ont été civilisés à mort. Partir. Mais oui, nous sommes partis. Nous ne sommes plus là. La police traite avec des ombres. La mer va rester belle, solitaire. Nous lui avons tourné le dos. La perte est en nous.  Ayons un dernier regard sur son pouvoir ensorcelant. On a tout mesuré. Le chiffre a bétonné le monde. Tous les entre-deux sont abolis.

Etel Adnan

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